29
Dec
2016

Lascaux IV inauguré par François Hollande

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Montignac - Tourisme

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Lascaux 4 a été inauguré par François Hollande, président de la République, samedi 10 décembre 2016, soit cinq jours avant l'ouverture officielle du site au public. Le Centre international d’art pariétal de Montignac en Dordogne présente plusieurs atouts. La célèbre grotte préhistorique a été reproduite à l’échelle et en quasi-intégralité, et la qualité des fresques et des reproductions est soulignée par tous. L'obscurité (*), la température intérieure et le taux d'humidité ont été scrupuleusement reproduits, tout comme les oeuvres révélées avec une précision chirurgicale de 16 points de mesure au millimètre carré ! Le Chef de l'Etat a parlé aussi du "plus architectural' du bâtiment, des explications "scientifiques" autour de l'art pariétal, et d'un site qui permet d'ouvrir la culture au plus grand nombre... Le Chef de l'Etat n'a pas manqué de féliciter les artistes peintres pour cette réplique "parfaite". Les autres atouts de la visite sont l'équipement numérique remis à chaque visiteur, enfant ou adulte, et les salle d'interprétation et galerie interactive qui suivent le fac-similé.

Germinal Peiro, président du Conseil départemental de la Dordogne a énuméré tous les financeurs du projet, a félicité aussi tous les acteurs, et a déjà évoqué le futur de Lascaux 4... La Région et le Département ont été les plus gros financeurs du budget estimé à 57M€ (66M€ avec les équipements périphériques). Alain Rousset, président de la Région Nouvelle-Aquitaine, et fervent de tout ce qui touche à l'économie comme à l'innovation, l'a souligné à la tribune...

François Hollande a dévoilé une plaque dans le hall d'entrée du site et a suivi le parcours qu'emprunteront les 400 mille visiteurs attendus. Dans son discours, ensuite, il a souligné : le but de la création de "Lascaux 4" est d’assurer une "sanctuarisation totale" du site historique que le flux de touristes et de véhicules visitant "Lascaux 2", à proximité immédiate de la grotte originelle, menaçait, notamment "en raison des risques possibles d'incendie sur la colline". Le président de la République n'a pas manqué de faire un trait d'humour pour souligner que cette inauguration de Lascaux tombait au bon moment... (Voir vidéo au bas de cet article, extraits du discours du Président) Après son discours, le président a traversé le grand chapiteau au milieu des invités. Le petit bain de foule n'était, parfois, pas loin de la bousculade...

Pour Danièle Mazet-Delpeuch de Chavagnac, ex-cuisinière de l'Elysée, l'inauguration de Lascaux était une fête..."Tout le monde se réunit autour d'une fête populaire. Il y a quelque chose de bon enfant, d'affectueux, c'est très amical, très périgourdin en fait !" C'est une chance pour Montignac selon le président de l'amicale Laïque Bernard Criner... "C'est une fête qui ponctue un long travail d'imagination de ce projet, de conception et de construction. C'est magnifique. Pour une fois qu'une volonté politique exprimée débouche comme ça sur un projet aussi important pour un territoire, je crois que l'on peut le saluer, et le fait que ce soit à Montignac, c'est remarquable".

Pour le président de la communauté de communes du Terrassonnais, Dominique Bousquet, c'était surtout un événement médiatique... "C'est une grande journée en Dordogne mais c'est aussi au niveau des médias une grande communication sur l'ensemble du pays. Ce matin (*samedi) à 7h sur France Inter, on entendait parler de Lascaux et c'est ainsi toute la journée. C'est un atout considérable si maintenant on sait travailler autour. C'est à nous de créer les structures hôtelières, touristiques et de développer de l'économie..."  Les retombées de Lascaux auront lieu bien au-delà de Montignac selon le président de l'office de tourisme Terrasson-Thenon-Hautefort, Frédéric Gauthier... "Lascaux 4, c'est un atout considérable, d'autant plus que le territoire de l'office de tourisme Vézère-Périgord noir est à proximité immédiate, donc pour nous c'est un formidable outil d'attractivité..."

Pour Ludovic Marzin, vice-président de la communauté de communes Vallée de l'Homme : "on l'attendait depuis longtemps et puis on y est, c'est le grand jour. En plus, belle réussite puisque les infrastructures sont en place et répondent à l'attente d'une telle journée (...). On est impressionné par la dimension de ce site. C'est surtout la restitution de la grotte à l'identique et puis tous les autres espaces sont effectivement très intéressants, car ils permettent d'approfondir la connaissance de Lascaux et de découvrir toutes les gravures qui sont, là, mises en évidence. On a une grotte qui est très bien représentée et beaucoup plus proche de la grotte originelle que ne l'était Lascaux 2".

Le gardien de la grotte originelle, Bruno Desplat, a été lui-même subjugué lors de la visite de Lascaux 4. Lui, qui a eu la chance d'accompagner plusieurs fois les scientifiques ou lors des contrôles dans la vraie grotte, se confie... "C'est un travail d'orfèvre, c'est merveilleux, je peux vous dire que le détail y est vraiment. C'est comme l'original. J'ai été troublé à un moment, notamment dans la partie de la nef où se trouve la vache noire. Et là, c'était tellement beau, tellement réaliste, j'ai même eu la larme à l'oeil. J'étais ému, j'ai eu vraiment des frissons, j'étais bluffé ! On peut dire merci aux artistes, je leur tire mon chapeau. Je me suis effectivement demandé, dans certaines parties de la grotte, où j'étais... dans la vraie grotte ou pas ?!"

La ministre de la Culture, Audrey Azoulay, était présente ainsi que Simon Coencas, le dernier "inventeur" survivant de la grotte, Mmes Ravidat et Agniel, Muriel Mauriac, conservatrice de la grotte de Lascaux, le sénateur Bernard Cazeau, le maire de Montignac Laurent Mathieu, les conseillers départementaux Christian Teillac, Nathalie Manet-Carbonnière, Michel Lajugie et Régine Anglard...

A Lascaux 4, sur 8.500m2, l’objectif est de faire revivre au visiteur le ressenti des quatre adolescents qui découvrent la grotte en 1940, accompagnés de leur chien "Robot". C'est l'éboulement qui a obstrué l'entrée de la grotte qui lui a permis, en fait, de conserver la qualité chromatique des fresques pendant 18.000 ans...

- Centre international de l’art pariétal, Montignac (Dordogne). Visites tous les jours de 9 heures à 19 heures, sauf le 25 décembre et le 1er janvier de 13 h à 18h (à partir du 1er avril, ouvert jusqu'à 20h, et en été jusqu'à 22h voire 23h30 certains jours). Entrée : de 10,40 euros à 16 euros. Lascaux.fr

- Extraits du discours de Germinal Peiro, Alain Rousset et François Hollande :

http://youtu.be/TWFDlCRNGG4

- (*) Un éclairage indirect dissimulé dans les parois éclaire, de bas en haut, les fresques au plafond et en majorité en hauteur. Cet éclairage évoque "les lampes à graisse qu'auraient utilisé nos ancêtres pour réaliser leurs peintures".

- La durée de la visite du fac-similé (grotte) est de trois quarts d'heure, mais il faut compter deux heures et demie à trois heures, au total, pour prendre le temps de découvrir les autres salles qui sont des espaces ouverts, et d'approfondir ses connaissances sur la préhistoire. Des accueils restauration sont prévus sur place et à proximité sur la commune.


Lascaux dans la presse :

- France Bleu Périgord  : "Lascaux IV c'est quoi ?" vidéo 1 mn ; "explorer l'inconnu"

- L'histoire de Lascaux racontée par le "journal La Montagne" ; "autres articles"...


 

Dans "Le Monde" du 15 décembre 2016, Florence Evin écrit : "Des pigments naturels ont été appliqués avec un pinceau ou par projection à l’aide d’un tube pour l’effet soufflé comme à la préhistoire. L’éblouissement est total. Jeudi 8 décembre à Montignac (Dordogne), au Centre international de l’art pariétal, ou Lascaux 4, dans le fac-similé de la fameuse grotte ornée, même les plus exigeants des experts sont saisis face au grand bœuf sauvage ou aurochs qui accueille l’intrus à l’entrée de la salle des Taureaux, un boyau couvert de peintures sur trente mètres de long. Au pied de l’éboulement ­(reproduit lui aussi), qui a permis le 8 septembre 1940 à quatre gamins, sur les traces de leur chien Robot qui s’était glissé dans un trou, de découvrir cette « Sixtine de la préhistoire », les yeux de Jean Clottes brillent d’un feu intense. A 83 ans, le spécialiste de l’art pariétal, qui étudie depuis des ­décennies les cavernes ornées du paléolithique, lance avec son ­accent chantant :« J’ai visité la grotte de Lascaux moult fois. Si je ne trouvais pas cette grande réalisation fidèle à l’originale, je ne serais pas venu. Il faut respecter le public, les gens sont sensibles à la très grande qualité, cela va de soi. Le conseil scientifique [présidé par Yves Coppens, et dans lequel siège Jean Clottes] suit les travaux, demande des modifications et le résultat est là. » On ne le contredira pas, la réplique grandeur nature de la totalité de la grotte est remarquable jusqu’aux moindres détails reproduits, comme ces éclats de calcaire détachés de leur support par l’humidité. Et le préhistorien de pointer ce que nous n’avions pas vu, derrière l’échine du mastodonte, la tête d’un ours, le dos et la patte de l’animal comme s’il avait été éjecté par la masse du taureau en marche. L’effet de perspective donné par les lignes de fuite, de vitesse, la puissance de la bête, comme la grâce et la sensibilité avec lesquelles l’artiste de la préhistoire a saisi les détails, la courbure des cornes, l’œil vif, le ­museau allongé, laissent sans voix. Comme la vivacité des couleurs, les imperfections et les irrégularités de la calcite. Tout a été fait pour que la copie de l’œuvre de nos ancêtres hommes de Cro-Magnon donne le change, jusqu’à l’humidité et la fraîcheur de la caverne originale. C’était « des gens comme nous, avec le même cerveau, le même ­aspect physique, le même système nerveux, les mêmes capacités que les nôtres », note Jean Clottes dans son ouvrage L’Art des cavernes (Phaidon, 2008). Gravées et peintes, il y a environ dix-sept mille ans, sur les deux cents mètres de long des galeries et salles voûtées, les cavalcades des chevaux jaunes et roux dits « chinois », celle des cerfs aux bois majestueux affolés par le courant d’un torrent à franchir, la lutte de deux bisons, sont comme prises sur le vif. C’est l’Atelier des fac-similés du Périgord (AFSP) qui a réalisé les 900 mètres carrés décorés de la grotte, et les 2 000 figures tracées et plus ou moins élaborées, pour un coût de 6,5 millions d’euros hors taxes, dix pour cent du budget total de l’opération, précise son directeur artistique Francis Ringenbach. Un décor réalisé sur un « voile de pierre », une coque en résine industrielle recouverte de résines minérales, afin de reproduire l’exact aspect de la grotte originale qui a été scannée en 3D. Sont intervenus trente-quatre sculpteurs, peintres, décorateurs de théâtre et de cinéma, restaurateurs… durant trente et un mois, utilisant les pigments ­naturels – oxyde de manganèse pour le noir et oxyde de fer pour les ocres, les jaunes et les rouges –, appliqués avec un pinceau ou par projection à l’aide d’un tube pour l’effet soufflé comme le faisait l’artiste de la préhistoire. « Le ­vidéoprojecteur reproduisait sur le segment à peindre l’image en 3D avec sa couleur et sa déformation, explique Francis Ringenbach. Les équipes ont tourné afin que chaque artiste n’y laisse pas sa part d’expression personnelle. » Un espace numérique et interactif, avec écrans tactiles et casques sonores pour les explications, baptisé « Atelier de Lascaux » complète la visite. Car la grotte de Lascaux, la vraie, fermée au public depuis 1963, sur décision d’André Malraux, le restera. L’apparition d’algues vertes, alors qu’elle recevait 1.800 visiteurs par jour, avait sonné l’alerte. En 2000, l’installation d’un climatiseur provoqua des champignons blancs. En 2004, c’est la photographie en 3D, avec éclairage intensif durant des centaines d’heures, qui déclencha l’éruption de taches noires. « Aujourd’hui, la grotte va mieux, mais elle reste fragile, ­observe Muriel Mauriac, conservatrice du site, classé en 1979 Patrimoine mondial de l’Unesco. La situation semble relativement stable même dans l’abside, le secteur le plus complexe. » La « vieille dame » de la Vézère restera fermée. Georges Bataille la plaçait à la « naissance de l’art moderne », bien avant la découverte, en 1994, de la grotte Chauvet, deux fois plus âgée. Toutes les deux, au sommet de l’art ­pariétal, ont désormais leur double pour le bonheur du public".